Jour 16
J'avais oublié…
Mes oreilles sont toutes dépaysées. Nous sommes
arrivés à Ooty, petite ville en haute montagne, perchée sur une falaise.
L'hôtel, le Willow Hill, est jouqué plus haut encore, haut dans le ciel du
silence. Un mot que j'avais oublié. Seuls les croassements des corbeaux
stimulent mon tympan surpris. L'air est frais et il semble que même la nuit, la
température descend à cinq degrés Celcius. Une bonne chose que j'aie apporté
avec moi mes combines et mon polar. On verra bien cette nuit.
Je suis assise dans un jardin surplombant la ville.
À part quelques toitures en tuiles de céramique, et aussi un vrombissement très
lointain, rien ne nous laisse croire que je suis en Inde. Me voici donc dans un autre extrême
du continuum indien. Il est 17 h et du minaret de la ville, tout en bas, les
incantations se mêlent à celles des corneilles.
J’avais publié ce que cela pouvait faire, le
silence. Cela me rappelle mon séjour dans l'Arctique en 1976. Un professeur
nous avait gratifié d'un visionnement de ses diapositives sur le plus Grand
Nord encore. Tout était glace, blancheur, tumulte de cascades bleu flamboyant.
Et au beau milieu de son carrousel, le coquin avait glissé une image d'une
forêt d'automne. Les cris de joie qui fusèrent alors! J'avais, là aussi, oublié
que la nature pouvait être multicolore.
C'est le même phénomène ici. Le silence existe
encore. Le stress sournois de l'hystérie de la ville relâche son étau. Je sens
les muscles de ma tête respirer. Le soleil qui baisse doucement réchauffe mes
yeux. Le fond de l'air est frais. Bon, j'avoue que ce que je viens de décrire
est loin du silence absolu. Mais qu'importe! La prière qui se déclame dans la
vallée, le chant des oiseaux, le jardinier qui arrose les plates-bandes de
fleurs d'hiver, le ronronnement lointain de la ville en contrebas, tous ces
bruits sont musique à mes oreilles et cela est bon. Cette Inde est
définitivement bourrée de surprises.
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