Les pierres
L'Inde ne cesse de nous surprendre: autant nous sommes désarçonnés par certaines situations, autant nous sommes émerveillés par les découvertes que nous y faisons. Nous nous habituons tant bien que mal aux transports publics, à la pollution et au chaos inhérent qui règne dans les villes. Les repas sont des moments de satisfaction renouvelés. Nous mangeons surtout vegétarien, nous maîtrisons de plus en plus la faculté de manger sans ustensile et uniquement de la main droite, car ici, la gauche est impure: le papier de toilette est presque inexistant et les indiens se lavent le cul de la main gauche, après vous savez quoi. Il faut aussi être vigilant dans les communications car chacun semble comprendre l'anglais, mais ce n'est pas le cas et l'accent qui teinte leur langue de Shakespeare est VRAIMENT très difficile à saisir.
Les merveilles qui nous ont littéralement scié en deux restent rattachées à la pierre et à la religion: il s'agit de temples. Les premiers qui retiennent notre hébétude sont des temples creusés à même le roc, soit un peu comme des grottes ou encore complètement sculptés, se détachant de la montagne.
Elephant Island est à une heure de bateau dans la baie de Mumbai. Sur cette île se dresse un sanctuaire creusé dictement dans la pierre: un très joli temple dédié à Shiva, creusé entre 450 et 750. Le lieu fait partie maintenant du patrimoine mondial de l'UNESCO. Au fond du temple est sculpté en relief une triple tête de la divinité qui mesure cinq mètres de haut. Nous étions plutôt impressionnés par ce travail de troglodyte, mais ça n'était que pour mieux tomber de notre chaise deux jours plus tard.
Nasik, à une centaine de kilomètres au nord-est de Mumbai, nous a offert une autre belle surprise. À quelques kilomètres du centre ville, se dresse une colline qui abrite les 24 grottes bouddhiques de Pandav Leni. On grimpe pendant une vingtaine de minutes la colline sur un chemin boisé qui m'a donné mes premières photos d'oiseaux. Les grottes présentent toutes une entrée cernée de colonnes, l'intérieur des temples est parfois très vaste et cache, au fond, une statue de Bouddha assis, impassible. Les moines qui ont creusé et taillé ces grottes/temples se sont évertués entre le premier siècle avant JC et le deuxième après. Fascinant!
Un peu plus loin, à Aurengabad plus précisément, nous avons été jetés par terre devant les merveilleuses grottes d'Ellora. On accède à la petite ville après une promenade de 30 kilomètres dans la campagne indienne. Le site est vaste, les 34 grottes s'étendent sur deux kilomètres et sont divisées en trois zones distinctes: 12 grottes bouddhiques réalisées entre 600 et 800, 17 grottes hindoues creusées entre 600 et 900 et enfin cinq temples jaïnes creusés entre 800 et 1000. Nous retenons surtout les dernières avec les détails extraordinaires dans les sculptures de reliefs et la finesses des détails architecturaux. Ce qu'il y a se saisissant est qu'une grande partie de ce temple n'est pas creusé, mais bien excavé, c'est-à-dire qu'on a fait sortir de la masse de roc un bâtiment relativement petit (environ cinq mètres de côté sur huit de haut) avec toit et plafond. Mais ce qui confère au site son titre de patrimoine mondial de l'humanité est sans contredit le temple #16 (le temple de Kailasa), dédié encore à Shiva. L'ampleur est égale à deux fois celle du Parthénon d'Athène, c'est tout dire. Il s'agit en fait du plus grand ensemble creusé architectural monolithique de la planète. Combien de centaines de tonnes de pierre ont été enlevées pour ce seul temple par les 7000 ouvriers sur 150 ans de travaux exténuant? Ce temple fait deux étages, est complètement dégagé de sa gangue de pierre, est entouré d'une cour d'au moins quinze mètres tout le tour de la "construction" et, sous la paroi rocheuse qui entoure cette cour sont creusées des galeries énormes avec une colonnade imposante. L'extérieur est rempli de sculptures, si haut que l'on puisse voir. Difficile à décrire et encore plus à imaginer probablement. Une petite recherche Google de votre part en vaudrait sûrement la peine. Le crémage sur le gâteau était ces deux beaux perroquets vert et bleu perchés à travers les représentations de Shiva, tout là-haut.
Plus loin dans notre voyage, nous sommes arrivés à Hassan cette ville est en soi assez ordinaire, mais c'est une bonne base pour les visites de trois sites exceptionnels. À 38 kilomètres au nord se trouve Belur, une petite ville où se cache le temple de Channakeshava, construit en 1116, joyau de l'architecture ancienne hindoue. À l'extérieur, le temple est rempli à ras bord de milliers de sculptures des dieux hindouïstes avec des détails inimaginables ciselés dans cette pierre grise ou beige.
À 14 kilomètres de là, à Halebid plus précisément, se dresse un autre temple du même style, aussi saisissant que le premier. Il s'agit du temple de Hoysaleswara construit en 1121.
Pour terminer cette journée de découverte, nous sommes redescendu vers le sud, avons passé Hassan et à 42 kilomètres est apparu le Vindhyagiri Hill au pied duquel se love de village de Sravanabelagola. Sur cette colline de pierre lisse, quelqu'un a pensé, autour de l'an 1000, à sculpter un monolithe de 17,5 mètres de haut (la plus grosse statue monolithique au monde) autour de laquelle on a érigé un temple des plus intéressant. Cette statue personnifie un homme, mastodonte nu représentant la divinité jaïne Gomatedhara. Cette religion est presque éteinte, si on peut s'exprimer ainsi. Justement, à notre arrivée au dit temple, une cérémonie religieuse était en cours aux pieds du géant de pierre et le jeune prêtre officiant nous a oint la main et tracé un point jaune entre les yeux. Sympa comme tout! Pour accéder au temple, il faut gravir les 634 marches taillées directement dans le roc. La vue est splendide au faîte de la colline. Ce qui est le plus flyé est qu'il faut faire toute la visite sans chaussures, heureusement les chaussettes sont tolérées. Avant notre ascension, comme il était passé midi et que nous cherchions un restaurant, un type assez âgé nous a amené à une maison qui était en fait la sienne où son épouse nous a cuisiné un excellent repas pour presque rien.
L'archéologie nous a toujours fascinée de même que l'architecture. Ici nous sommes servis. En seux semaines de route, nous avons visité des splendeurs historiques uniques. Et nous continuons notre descente vers le sud, telles des pierres qui n'amassent vraiment pas de mousse, pas le temps!
jcsh
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