jeudi 2 février 2012

On the road

25 janvier 2012
Dans le trian, entre Nasik et Aurengabad

Le train

Prendre le train en Inde est exactement comme vous l'imaginez, mais en différent: c'est pire encore.

Sur le trajet qui est le nôtre, à partir de Mumbai, il n' y a que des wagons de deuxième classe. La première partie (Mumbai-Nasik) a été bien sûr éprouvante, mais au moins, c'était le début du périple, c'est-à-dire que l'on pouvait s'installer tranquillement en gare, ranger nos gros sacs sur les porte-bagages sans se presser, sachant qu'on avait le temps. Trois sièges de chaque côté du couloir et suffiamment de place pour nos grandes jambes d'occidentaux. Et puis ça se remplit, bien plein! Dans le bout des wagons, où se trouvent les portes, il y a plein de gens debout. Et puis on part, pour trois heures d'affilées, avec une dizaines d'arrêts à des gares intermédiaires. Commence alors la ronde incessante des vendeurs/crieurs. Vendeurs de café, d'eau, de chips, de pop corn, de friandises, de bouffe odorante, de babioles 5-10-15, de livres, de cartes de l'Inde, de ceintures de travail, de toupies et que sais-je encore? À chaque arrêt, il y a des gens qui sortent et il y en a d'autres qui entrent. Il s'agit d'un moment de grande confusion: on récupère ses bagages, on pousse, on crie, on a peur de ne pouvoir sortir a temps. Les nouveaux s'installent, cherchent de la place pour les bagages, se sont trompés de wagons, se croisent dans l'allée trop étroite, le tout pendant que le train se met en marche.

Il fait chaud, les fenêtres sont toutes ouvertes et une dizaine de ventilateurs conventionnels fixés au plafond essaient de rafraîchir l'ambiance. Il y a une cacophonie parfaite où s'accumulent les voix trop fortes des vendeurs, les conversations téléphoniques, les rires et les discussions, le tout enrobé du bruit des roues de fer sur les rails de fer. Une odeur d'urine embaume le wagon, même en pleine marche. L'arrivée à Nasik nous crache sûr le quai, un peu hébétés. C'est un autre choc.

La halte à Nasik est importante, c'est une grosse ville, plus d'un million d'habitants. Nous sommes plusieurs à descendre et il y en a encore plus pour nous remplacer. Le quai grouille de monde. Nous ne sommes plus à Mumbai, les écritures sont partout en Indi, c'est-à-dire incompréhensibles pour nous. L'anglais parlé y est plus approximatif. Les taxis noirs et jaunes ont laissé leur place aux rickshaws (tuktuks).

Deux jours plus tard, le départ de cette ville nous confronte à notre sens du voyage: épique. D'abord se rendre à la gare à temps, trouver quelque chose à manger avant de partir de l'hôtel, arriver au moins 30 minutes avant le train, attendre au soleil sur le quai. Le train arrive, de Mumbai! Il continuera vers Aurengabad et plus loin encore. Là il faut pousser et tasser les gens pour intégrer notre wagon D3, ensuite déloger les personnes qui sont assises à nos places désignées, attendre au moins une heure avant de trouver une place qui se libère pour nos gros sacs que l'on a entretemps debout entre nos jambes. Un type dort sur le porte-bagage juste au-dessus de moi. Toujours l'odeur d'urine et, ici, plein de gens debout dans l'allée.

On entre facilement en communication avec les autres. Ici avec le garçon de seize ans à mes côtés qui veut savoir d'où on vient et où on va, là avec le jeune ingénieur musulman parlant un excellent anglais, très cultivé et loquace. Il faut dire qu'à coup sûr nous sommes les seuls voyageurs occidentaux dans tout le convoi, long comme d'ici à demain. Nous formons des petits groupes de six, trois en face des trois autres, trois femmes vêtues du sari traditionnel et trois hommes habillés comme vous et moi. Marie est de l'autre côté avec son groupe, plongée dans le dernier Paul Auster qu'elle terminera probablement avant l'arrivée à Aurengabad.

À toutes les fois que j'ouvre mon sac, je sens vingt paires d'yeux en plus des cinq de ceux de mon groupe vissés sur mes mains: ah tiens, une bouteille d'eau, un livre de Dostoyosky, un livre de sudoku ou mon Lonely Planet. On ne sent aucune agressivité, juste de la sympathie pour certains, de la curiosité pour la plupart et surtout de l'incompréhension: mais que peuvent-ils bien faire ici, dans ce train, ces étrangers?

jcsh

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